Le reporting extra financier
Les actualités liées au réchauffement climatique ont entraîné une prise de conscience mondiale quant à la nécessité de renforcer la responsabilité des entreprises, notamment via le reporting extra financier. L’Europe a la volonté d’être leader mondial en la matière. A la suite des accords de Paris, la Commission Européenne a lancé en 2019 sa politique sur la transition écologique, appelé « Le pacte vert » ou « Green Deal ». C’est un ensemble de mesures visant à engager l’UE sur la voie de la transition écologique, l’objectif ultime étant d’atteindre la neutralité climatique à l’horizon 2050.
Dans ce cadre, les entreprises vont devoir remplir de nouvelles obligations en matière de reporting extra financier : À partir du 1er janvier 2024 pour les entreprises déjà soumises à la directive sur la publication d’informations non financières et à partir du 1er janvier 2025 pour les grandes entreprises non soumises aujourd’hui à la directive sur la publication d’informations non financières.
Ces obligations vont avoir des répercussions en cascade sur les PME également car les grandes entreprises exigeront à leurs fournisseurs de se mettre en marche vers plus de responsabilité ESG et de pouvoir le prouver. Déjà aujourd’hui, les donneurs d’ordres font régulièrement des demandes en ce sens dans leurs cahiers des charges.
Sommaire
Définition : Qu’est-ce qu’un reporting extra financier ?
Le « reporting extra financier » signifie le fait de mesurer un certains nombres de critères afin de collecter les données des entreprises sur les aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance. Ensuite, ces données sont inscrites dans des rapports extra-financiers qui sont publiés par l’entreprise en plus de ses résultats financiers : ces rapport sont souvent appelé rapport RSE, rapport de durabilité ou rapport de développement durable.
Le reporting ESG ou rapport ESG constitue une partie importante du rapport de durabilité d’une entreprise puisqu’il se concentre spécifiquement sur trois domaines clés : environnement, social et gouvernance. On peut dire que les critères ESG constituent les piliers d’une gestion responsable, aux côtés du suivi des indicateurs économiques et financiers qui seuls, sont insuffisants pour évaluer la pérennité et la résilience des entreprises de nos jours.
CSRD : Vers un reporting extra-financier plus exigeant
En France, ce document se traduisait jusqu’à présent par la déclaration de performance extra-financière des entreprises (DPEF). En Belgique on parlait simplement de déclaration non financière. Quel que soit le pays, cette déclaration est un document qui communique sur la démarche RSE et se fonde sur le développement durable.
Comme nous l’expliquions dans l’introduction de cet article, le cadre réglementaire de la déclaration de performance extra-financière va évoluer, dans le cadre d’un renforcement des objectifs européens en matière de finance durable. La directive NFRD (Non Financial Reporting Directive) va ainsi être remplacée par la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), qui implique des informations complémentaires relatives aux enjeux RSE, ainsi que des exigences accrues quant à la cohérence des informations par rapport aux objectifs de l’entreprise et quant à la pertinence des KPIs (indicateurs clés) retenus.
Quelles sont les entreprises concernées par l’obligation d’un reporting extra-financier ?
La CSRD étend l’obligation d’établir et de publier une déclaration non financière à toutes les entreprises de plus de 250 travailleurs et à toutes les sociétés cotées sur les marchés réglementés (à l’exception des micro-entreprises cotées).
L’application du règlement se fera en trois temps :
À partir du 1er janvier 2024 pour les entreprises déjà soumises à la directive sur la publication d’informations non financières (publication en 2025);
À partir du 1er janvier 2025 pour les grandes entreprises (+250 employés) non soumises aujourd’hui à la directive sur la publication d’informations non financières (publication en 2026);
À partir du 1er janvier 2026 pour les PME cotées, ainsi que pour les établissements de crédit de petite taille et non complexes (publication en 2027).
Si les thèmes à aborder dans le rapport extra financier resteront globalement les mêmes que dans la directive NFRD, la CSRD présente un certain nombre de nouveautés. La nouvelle directive introduira des exigences plus détaillées en matière de reporting. Elle imposera également une certification du reporting par un auditeur ou un certificateur indépendant accrédité.
Quelles sont les thématiques abordées dans le reporting extra-financier ?
On retrouve les 3 thématiques :
E pour la thématique environnementale :
Les critères environnementaux qui mesurent l’impact direct ou indirect de l’activité de l’entreprise sur l’environnement (par exemple : les émissions de CO2, la consommation d’électricité, le recyclage des déchets, l’impact sur la biodiversité).
S pour la thématique sociale :
Les critères sociaux (ou sociétaux) qui portent sur l’impact direct ou indirect de l’activité de l’entreprise sur les parties prenantes (en particulier collaborateurs, clients, fournisseurs et communautés locales) par référence à des valeurs universelles (par exemple : droits humains, normes internationales du travail — sûreté, sécurité, représentation…), gestion de la chaîne d’approvisionnement, santé et sécurité des clients, etc.
G pour la thématique gouvernance :
Les critères de gouvernance qui portent sur la manière dont l’entreprise est dirigée, administrée et contrôlée (relations avec les actionnaires, son conseil d’administration et sa direction, la transparence de la rémunération des dirigeants, la lutte contre la corruption), droits des actionnaires, engagement des parties prenantes et gouvernance des relations.
Les avantages du reporting extra-financier
Transparence et responsabilité : Le reporting extra-financier permet aux entreprises de communiquer de manière transparente sur leurs performances en matière de durabilité, d’éthique et de responsabilité sociale. Cela renforce la confiance des parties prenantes, y compris des clients, des investisseurs et du grand public, en démontrant l’engagement de l’entreprise envers des pratiques commerciales responsables.
Gestion des risques : Le reporting extra-financier aide les entreprises à identifier, évaluer et gérer les risques non financiers liés à des facteurs tels que le changement climatique, les droits de l’homme, la diversité et l’inclusion. Cela permet aux entreprises de prendre des mesures préventives et de s’adapter aux évolutions du marché et de la réglementation.
Accès au financement : De plus en plus, les investisseurs intègrent des critères ESG dans leurs décisions d’investissement. Le reporting extra-financier permet aux entreprises de démontrer leur performance dans ces domaines, ce qui peut améliorer leur attractivité auprès des investisseurs socialement responsables et faciliter l’accès à des financements durables.
Avantage concurrentiel : Les entreprises qui intègrent des considérations extra-financières de manière proactive peuvent bénéficier d’un avantage concurrentiel. Cela peut se traduire par une amélioration de la réputation de la marque, une fidélisation accrue des clients et une attractivité accrue en tant qu’employeur.
Innovation : La gestion des enjeux extra-financiers nécessite souvent des innovations dans les processus, les produits et les services. Le reporting extra-financier encourage donc l’innovation en incitant les entreprises à développer des solutions durables et à s’adapter aux défis environnementaux et sociaux.
Conformité réglementaire : Dans de nombreuses juridictions, le reporting extra-financier est devenu obligatoire ou est fortement encouragé. Se conformer à ces réglementations renforce la crédibilité de l’entreprise et évite les risques juridiques associés à la non-conformité.
Attention au greenwashing
Le greenwashing se réfère à la pratique trompeuse par laquelle une entreprise ou une organisation tente de donner l’impression qu’elle adopte des pratiques respectueuses de l’environnement, de durabilité ou socialement responsables, alors qu’en réalité, elle ne prend que des mesures superficielles ou peu significatives dans ce domaine. Cette stratégie vise à améliorer la réputation de l’entreprise en capitalisant sur l’intérêt croissant du public pour les questions environnementales et sociales, sans réel engagement envers la durabilité.
Voici quelques raisons pour lesquelles il est important d’éviter le greenwashing :
Duperie des consommateurs : Le greenwashing trompe les consommateurs en leur faisant croire qu’ils soutiennent une entreprise socialement responsable, alors que celle-ci peut ne pas respecter les normes éthiques et environnementales promises. Cela crée une fausse confiance et peut entraîner des choix de consommation basés sur des informations erronées.
Discréditation des efforts sincères : Les entreprises véritablement engagées dans des pratiques durables et responsables peuvent être discréditées par celles qui utilisent le greenwashing. Les consommateurs peuvent devenir sceptiques à l’égard de toutes les revendications environnementales, ce qui complique la distinction entre les entreprises authentiques et celles qui cherchent simplement à améliorer leur image.
Manque de progrès réel : Le greenwashing ne contribue pas aux efforts réels de lutte contre les problèmes environnementaux et sociaux. Au lieu de prendre des mesures significatives pour réduire l’empreinte écologique ou promouvoir des pratiques durables, une entreprise se contente de faire de la publicité pour des actions superficielles, ce qui ne favorise pas la transition vers un modèle plus durable.
Non-respect des normes éthiques : Le greenwashing peut conduire à des violations éthiques, notamment le non-respect des normes du travail, l’exploitation environnementale et d’autres pratiques non éthiques. Cela peut entraîner des conséquences négatives tant pour l’entreprise que pour la société dans son ensemble.
Réglementations et litiges potentiels : Les gouvernements et les organismes de réglementation intensifient leurs efforts pour lutter contre le greenwashing. Les entreprises pratiquant le greenwashing peuvent être exposées à des sanctions, des amendes et des litiges juridiques si elles enfreignent les règles et réglementations en matière de publicité et de pratiques commerciales trompeuses.
Historique : Les grandes étapes du développement durable
Une étape importante en matière de prise de conscience remonte à 1987 lorsque la Commission Mondiale sur l’Environnement et le Développement a publié un rapport intitulé « Notre avenir à tous ». On y retrouve la première vraie définition du développement durable : « Le développement durable c’est répondre aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». Cette notion de développement durable est née de la prise de conscience des risques induits par les déséquilibres de la croissance au niveau mondial.
Le développement durable s’est répandu dans le monde de l’entreprise. On a commencé à parler de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) lorsque les entreprises et autres organisations ont commencé à mettre en œuvre des pratiques qui favorisaient le développement durable.
De manière plus formelle, la RSE est définie par la commission européenne comme : « L’intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et à leurs relations avec les parties prenantes ». Une entreprise qui pratique la RSE va donc chercher à avoir un impact positif sur la société tout en étant économiquement viable. La RSE ou « CSR » (Corporate Social Responsibility, en anglais) se base sur 3 piliers bien connus : la société, l’économie et l’environnement. Ils sont souvent utilisés en anglais. On parle des « 3P » : People, Planet, Profit.
Parallèlement à la RSE au niveau des entreprises, le secteur financier s’est aussi transformé avec les préoccupations sociétales et environnementales grandissantes. Les investisseurs traditionnels se transforment progressivement en investisseurs “socialement responsables”. Cela signifie qu’ils cherchent de plus en plus des opportunités d’investissement dans des entreprises qui sont performantes non pas uniquement financièrement mais aussi sur des critères non-financiers. C’est à ce moment-là qu’est né le sigle “ESG” dans le processus d’investissement. Un investisseurs socialement responsable va vouloir avoir recours à des investissement respectant les critères ESG (Environnement, social et gouvernance).
Cependant, même si le sigle ESG provient à l’origine du secteur financier, il devient de plus en plus la référence pour évaluer les stratégies d’entreprises durables, c’est-à-dire les stratégies RSE. Aujourd’hui l’ESG n’est donc plus uniquement utilisé par les financiers, mais ces critères sont applicables à toutes les entreprises vu que le cadre législatif Européen introduit une obligation de « Reporting des données ESG ».
Conclusion
En conclusion, le paysage économique actuel est marqué par une transformation majeure vers la durabilité et la responsabilité sociale des entreprises. Les entreprises sont appelées à jouer un rôle clé dans ce contexte et à se conformer aux nouvelles directives réglementaires, telles que la transition de la directive NFRD à la directive CSRD en Europe.
Le reporting extra-financier, en mettant l’accent sur les critères ESG, émerge comme un outil essentiel permettant de mesurer, de communiquer et de guider les actions des entreprises vers un avenir plus durable. Les avantages de ce reporting, tels que la transparence, la gestion des risques ou l’accès au financement, soulignent l’importance croissante de l’intégration de la durabilité dans la stratégie globale des entreprises.
Cependant, il est impératif d’éviter le greenwashing, car la crédibilité de ces initiatives dépend de l’engagement authentique envers des pratiques durables. À mesure que les entreprises s’adaptent à ces nouvelles normes, le reporting extra-financier devient un catalyseur essentiel de l’innovation, de la conformité réglementaire et de la contribution collective à la construction d’un avenir plus équitable et durable.
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